01/07/2025
Formation référent harcèlement - un must pour protéger vos salariés ?

Pourquoi un référent harcèlement est indispensable ?

Le harcèlement moral et sexuel au travail est une réalité préoccupante en France. Selon une étude de la DARES (Direction de l’Animation de la Recherche, des Études et des Statistiques) de 2014 (Source), 20 % des salariés déclarent avoir été victimes de comportements hostiles au travail. Par ailleurs, le Défenseur des droits estime que 30 % des plaintes qu’il reçoit concernent des situations de harcèlement au travail.

Nous constatons que les entreprises nous sollicitent de plus en plus pour mener des enquêtes internes après plusieurs signalements. Cela reflète une difficulté persistante. Prenons l’exemple de Marie qui travaille depuis cinq ans dans une entreprise de services. Si elle aime son travail, son quotidien est devenu un enfer depuis quelques mois. Son responsable direct ne cesse, selon ses propos, de la rabaisser en réunion, de l’exclure des échanges importants et de lui confier des tâches dévalorisantes. Elle hésite à en parler : à qui s’adresser ? Son entreprise n’a jamais communiqué sur un dispositif de signalement.

À l’inverse, dans l’entreprise où travaille Thierry, les choses sont bien différentes. Référent harcèlement depuis deux ans, il a suivi une formation rigoureuse qui lui a permis d’apprendre à détecter les signes avant-coureurs, à recueillir les signalements et à intervenir de manière appropriée. Lorsqu’un salarié vient le voir, il sait comment réagir.

Le parcours de Marie et celui de Thierry illustrent une réalité courante : sans un référent formé, les victimes de harcèlement peuvent rester isolées, et les comportements répréhensibles perdurent dans l’entreprise alors qu’avec un dispositif bien structuré, les victimes supposées trouvent un soutien et des solutions et l’entreprise assainit les relations.

Regardons dans le détail à quelles problématiques répondent les compétences d’un référent harcèlement. Pour cela commençons par identifier le cadre légal et les obligations des entreprises en matière de prévention du harcèlement à travers les parcours de Marie et Thierry.

Quels sont le cadre légal et les obligations des entreprises en matière de prévention du harcèlement ?

Dans l’entreprise de Marie, les obligations légales sont floues. L’employeur ne semble pas avoir mis en place de référent harcèlement ni de dispositif d’accompagnement des salariés en cas de harcèlement. Pourtant, la loi impose, dans le cadre d’obligations générales et spécifiques précisées par les art. L4111-1 à L4831-1 du code du travail plusieurs mesures :

  • Nommer et former un référent harcèlement.
  • Mettre en place une politique de prévention des RPS et du harcèlement
  • Instaurer un circuit de signalement clair et efficace
  • Réaliser des enquêtes internes administratives si l’analyse systématique d’un signalement le commande
  • Assurer la protection des victimes présumées et des témoins.

À l’inverse, l’entreprise de Thierry a instauré un cadre structuré qui s’appuie sur l’article L1152-1  à 1152-6 du code du travail. Chaque employé sait qu’en cas de problème, il peut contacter Thierry, qui saura l’orienter. Une communication régulière sur le dispositif de signalement et de traitement des signalements permet de briser le silence et de sensibiliser chacun des salariés de l’entreprise.

Comment le référent harcèlement contribue à la politique de prévention de l’entreprise ?

1- Les fonctions du référent

Orienter les salariés

Un matin, un manager vient voir Thierry. Un membre de son équipe a signalé un comportement inapproprié de la part d’un collègue, mais le manager ne sait pas comment gérer la situation. Thierry le rassure : il explique les étapes du signalement, les interlocuteurs à mobiliser et les mesures à envisager. Grâce à ses conseils, la situation est prise en charge rapidement.

Informer sur les droits et obligations

Lors d’un atelier de sensibilisation, un salarié demande : « Si je suis témoin d’un harcèlement et que je n’interviens pas, est-ce que je suis responsable ? » Thierry profite de cette question pour expliquer que chaque salarié a une obligation légale de veiller à la santé et à la sécurité de ses collègues (article L. 4121-2 du Code du travail). Les échanges permettent de clarifier ce qui relève du harcèlement et ce qui n’en est pas, levant ainsi de nombreuses confusions.

Enfin, Thierry par sa connaissance juridique claire peut rassurer les salariés sur L’absence de risque de représailles en cas de signalement puisque selon l’article L. 1152-2 du Code du travail, « aucun salarié ne peut être sanctionné pour avoir signalé des faits de harcèlement ».

Accompagner les salariés

Marie, elle, n’a personne vers qui se tourner. Lorsqu’elle évoque sa souffrance à un collègue, celui-ci lui conseille de « prendre sur elle » ou « d’aller porter plainte au commissariat ». Elle finit par douter d’elle-même et hésite à signaler les faits. Si un référent formé était présent dans son entreprise, elle aurait pu bénéficier d’un accompagnement neutre et sécurisé, comme Thierry sait le faire dans son entreprise.

C’est à ce titre que Thierry recueille les éléments de manière factuelle, comme il l’a appris au cours de sa formation. Puis après avoir rassurer la salariée, Thierry peut par exemple expliquer les démarches et l’accompagner lors des entretiens avec la direction pour garantir une prise en charge adéquate.

En cas de signalement d’éléments constitutifs de harcèlement, le référent a aussi pour mission d’évaluer la situation, de recueillir des informations et de proposer des mesures appropriées pour y remédier. Thierry veille alors à la confidentialité des témoignages tel que cela lui a été enseigné au cours d’une formation de référent et peut proposer un accompagnement personnalisé.

2- Les compétences du référent

Compétences relationnelles

Thierry sait que son rôle ne se limite pas à recevoir des signalements : il doit aussi instaurer un climat de confiance, prévenir et réguler les conflits. Un jour, une employée vient le voir, hésitante. Grâce à son écoute active et à son attitude bienveillante, elle finit par se confier. 

Selon les considérations de Christophe Martin dans son ouvrage de 2016 , « Harcèlement moral et risques psychosociaux au travail » (Dunod) (Source), pour réunir les conditions d’un apaisement d’un conflit, le référent doit être capable d’écouter les parties concernées sans prendre parti ni laisser ses propres perceptions influencer son analyse. Par exemple, quand deux salariés se sont accusés mutuellement d’attitudes inappropriées, Thierry en tant que référent s’est appuyé sur des faits concrets et non sur des impressions subjectives. Thierry sait qu’il ne doit ni juger ni influencer. Il reste neutre et impartial en restant concentré à ne pas projeter ses propres biais cognitifs ou stéréotypes, afin d’assurer une prise en charge objective et dépourvue de préjugés vis-à-vis de la victime supposée comme vis-à-vis de l’auteur présumé.

L’ensemble des situations relationnelles sont souvent source de confusion et de troubles. Thierry sait en tant que référent harcèlement qu’il doit avoir une communication très claire pour ne pas surajouter de confusion et permettre aux individus et collectifs de s’orienter pour s’engager dans les recherches de solutions.

Grâce à ses compétences en communication, la clarté de ses messages et sa forme de communication choisie et adaptée aux situations, le référent joue un rôle central dans la régulation des conflits et la prévention du harcèlement moral, contribuant ainsi à un climat de travail plus serein et respectueux.

Connaissances juridiques

Un salarié demande un jour à Thierry : « Mon collègue me fait des remarques humiliantes tous les jours, est-ce du harcèlement ? » Thierry lui explique les critères légaux : répétition des faits, les impacts sur la santé, la compromission de l’avenir professionnel, par exemple. Il lui fournit également des ressources pour mieux comprendre ses droits.

Par ailleurs, la fonction de référent harcèlement moral contraint Thierry à poser des questions pour savoir ce qu’il se passe quand on le sollicite de pareille manière. Thierry doit être capable d’expliquer sa légitimité à poser des questions, sa responsabilité en matière de santé et sécurité des salariés et de recueillir sans jugements les éléments. Là encore sa connaissance juridique des définitions permet à Thierry d’identifier des éléments constitutifs de harcèlement moral d’autres évènements et de faire des propositions aux services RH d’actions d’accompagnement étayées de ses arguments et de son analyse.

Une maîtrise solide de la législation sur le harcèlement au travail et des obligations incombant à l’employeur est indispensable pour que le référent puisse agir avec justesse et efficacité. Dans le cas d’un salarié qui interroge Thierry, le référent, sur la nature de remarques répétées et déplacées de la part d’un collègue, Thierry apporte un éclairage au salarié en s’appuyant sur les critères légaux du harcèlement (répétition, conséquences sur la santé mentale et physique), Thierry clarifie la situation, tout en informant le salarié de ses droits et des recours possibles.

Compétences en médiation

Dans l’entreprise de Thierry, une enquête interne a créé des tensions entre salariés. Certains prennent parti, d’autres évitent leurs collègues. Thierry met en place une médiation pour rétablir un dialogue apaisé. Il encourage chacun à exprimer ses ressentis de manière constructive et accompagne l’équipe dans une résolution apaisée du conflit.

Plus globalement, dans une situation de tension Thierry peut organiser ou suggérer au service RH une rencontre encadrée visant à clarifier les malentendus et à trouver des solutions acceptables pour les deux parties. Cela permet d’endiguer le processus de conflictualisation et de réunir les conditions d’apaisement qui évitent la transformation du conflit en harcèlement moral.

Compétences pédagogiques

En plus d’intervenir sur les cas signalés, Thierry en tant que référent harcèlement propose des actions de sensibilisation. Thierry utilise des jeux de rôle pour faire comprendre les dynamiques du harcèlement, des jeux de cartes, etc… En simulant différentes situations, les salariés réalisent l’impact de certains comportements et prennent conscience de l’importance d’un cadre de travail respectueux. C’est l’enjeu de cette prise de conscience qui motive Thierry à :

  • concevoir des supports de formation engageants (quiz, jeux de rôle, vidéos, témoignages) pour rendre l’apprentissage accessible et impactant.
  • adapter son discours en fonction de son auditoire : explications précises et accessibles pour les salariés, approche plus stratégique et juridique pour les managers et la direction.
  • animer des ateliers sur la gestion des conflits et la communication assertive afin d’armer les salariés contre les situations de harcèlement.

Thierry ne se contente pas d’informer : il suscite la réflexion, responsabilise et implique les salariés dans la prévention du harcèlement au travail. Son action pédagogique vise à transformer durablement les comportements et à instaurer une culture d’entreprise bienveillante et respectueuse.

Aussi, comme le précise l’INRS (Institut National de Recherche et de Sécurité), à travers les fiches pratiques sur la prévention des risques psychosociaux (RPS), le référent harcèlement joue donc un rôle crucial dans la prévention et la gestion des situations de harcèlement en entreprise. Ses compétences relationnelles, juridiques, de médiation et pédagogiques sont essentielles pour assurer un environnement de travail serein et protéger efficacement les salariés.

Quels sont les besoins en formation et la posture du référent ?

Thierry n’a pas acquis ses compétences par hasard. Son entreprise lui a permis de suivre une formation spécifique, couvrant :

  • Le cadre juridique du harcèlement.
  • Les techniques de recueil de témoignages.
  • La médiation et la gestion des conflits.
  • Les circuits de signalement et les ressources
  • La mise en place d’actions de prévention pour instaurer un climat de travail serein et
  • La cartographie des interlocuteurs internes et externes pouvant intervenir en soutien (RH, médecine du travail, CSE, autorités judiciaires, etc.).
  • L’organisation d’un circuit de signalement clair et sécurisé, garantissant la confidentialité des témoignages et la protection des personnes impliquées.

 

Pour mener à bien sa mission, le référent doit posséder un ensemble de qualités humaines et techniques qui lui permettent de gérer avec justesse et discernement les situations les plus délicates.

Il doit apprendre :

  • La compréhension fine des dynamiques relationnelles et des interactions
  • L’écoute active et la communication assertive pour recueillir la parole sans orienter ni
  • Une posture neutre et impartiale, garantissant ainsi une gestion équilibrée des conflits et des signalements.

La posture du référent harcèlement permet ainsi de démontrer à l’ensemble des salariés par sa pratique communicationnelle que la communication est la solution aux problèmes relationnels. En effet, le référent doit incarner lui-même une communication exemplaire, basée sur l’écoute active, la reformulation et la recherche de solutions concertées. En adoptant une posture claire et assertive, il démontre que la communication bienveillante et constructive est un levier fondamental pour désamorcer les tensions et prévenir les situations de harcèlement. En modélisant cette approche, il encourage l’ensemble des acteurs de l’entreprise à adopter une communication favorisant un climat de travail sain et respectueux.

Sans cette formation, Thierry n’aurait pas su comment réagir face aux situations complexes qu’il rencontre quotidiennement.

Une action concrète pour un environnement de travail sécurisé

Dans l’entreprise de Marie, l’absence d’un référent formé a laissé une salariée en détresse, sans soutien. Dans celle de Thierry, un dispositif structuré a permis d’accompagner et de protéger efficacement les employés.

Le « rapport sur le harcèlement au travail » du défenseur des droits de 2020, indique que former un référent harcèlement, est bien plus qu’une obligation légale : c’est un engagement en faveur du bien-être des salariés et d’un climat de travail serein (Source)

Grâce à des professionnels comme Thierry, les entreprises peuvent prévenir les situations de harcèlement et protéger efficacement leurs employés conformément aux préconisations et au guide du ministère du travail « Prévenir et agir contre le harcèlement au travail » (édition 2022) (Source)

Valérie LAGARDE

Propuls'

Consultante en management des risques et psychologue sociale du travail, Valérie s’investit depuis plus de 15 ans dans l’accompagnement des organisations soucieuses de concilier performance, éthique et qualité de vie au travail. Forte de son expérience en direction d’entreprise, elle développe des démarches de prévention sur mesure, à la croisée des enjeux humains et organisationnels. Valérie met en lumière un acteur-clé encore trop peu valorisé dans les entreprises : le référent harcèlement. Elle y rappelle que former ces professionnels, c’est bien plus qu’une réponse à une obligation légale — c’est un investissement concret dans la protection des salariés, la régulation des relations de travail et la construction d’un climat de confiance. Depuis plus de 10 ans, Valérie pilote des dispositifs d’évaluation des risques psychosociaux (RPS) et de Qualité de Vie et des Conditions de Travail (QVCT), avec le soutien d’une équipe pluridisciplinaire. Son approche vise à renforcer les compétences internes et à outiller les structures pour prévenir efficacement les dérives relationnelles et promouvoir un management plus attentif, plus formé, plus humain.

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